Au-delà des masques, qui suis-je ?


Soirée-discussion du lundi 17 septembre :



Au-delà des masques, qui suis-je ?



Nous nous définissons souvent par les rôles que nous jouons, les positions que nous occupons : statut social, situation professionnelle. Nous ne sommes plus, souvent, que : la femme de…, l’employée de chez Machin, celle qui a.. ou qui est …

Pourtant ces étiquettes, si elles nous donnent un statut, peuvent aussi devenir réductrices, oppressantes, et ne désignent au mieux qu’une partie de nous. Et si jamais l’une se décolle (divorce, chômage, accident), l’effondrement menace, il y a un risque de ne plus savoir qui nous sommes.

Alors que notre identité profonde, elle, est immuable, inaltérable, mais ne se laisse pas si facilement découvrir. 

Comment se construit notre identité ? 

Essentiellement par imitation, par adaptation à l’environnement. Il s’agit dans un premier temps d’être conforme aux attentes de l’entourage, dans le but (toujours le même), d’être reconnu, accepté, aimé.
Donald Winnicott, psychanalyste anglais, a appelé cette construction le Faux Self.  Cette sorte de masque, de carapace, est constituée par toutes les attitudes qui nous permettent d’être en adéquation avec les attentes de nos proches, collègues, amis, etc…

Ce Faux Self est dans un premier temps indispensable. Nous avons besoin d’apprendre comment interagir avec les autres, se comporter en société ; quels sont les codes à adopter, quelles sont les conséquences de telle ou telle attitude. Et aussi de pouvoir à des moments privilégier l’une de nos facettes, de nos aptitudes, de nos compétences, selon l’occasion. On ne réagit pas forcément de la même façon au travail qu’en famille, par exemple. Ou bien par moments on a besoin de hausser un peu le ton pour se faire entendre, alors qu’à d’autres il va s’agir de s’installer dans l’écoute pour mieux accompagner. 



Les problèmes apparaissent d’une part lorsque nous sommes trop identifiés à une ou plusieurs de nos étiquettes, de nos masques, et que ceux-ci viennent à nous faire défaut. 

  • Comment faire lorsqu’on est « la femme de.. » et qu’un divorce fait irruption ? 
  • Lorsqu’on se définit par son travail et qu’arrive la retraite ou une période de chômage ? 
  • Lorsqu’on a bâti sa réputation sur ses performances physiques et qu’un accident vient nous faucher en plein vol ? 

Le risque de perte d’identité menace lors de tout changement, y compris un changement positif

  • Pas simple de faire partie d’un milieu modeste, par exemple, et de réussir socialement. 
  • Ou de se démarquer de sa famille d’origine, où l’on était « le petit dernier », en devenant soi-même parent. 
  • Même perdre du poids ou arrêter de fumer altère la vision que l’on a de soi, et donc l’identité qui nous est renvoyée par cette image. 


Et d’autre part lorsque ce Faux Self devient trop éloigné de notre Vrai Self, notre identité profonde.

Lorsque l’écart est trop important, certaines parties de nous souffrent de ne pas pouvoir s’exprimer, et se manifestent à travers des symptômes, qu’ils soient physiques ou relationnels.
  

Une frustration qui peut de dire par des maux de tête, des angoisses, des douleurs irrationnelles, par exemple, et/ou un état de colère un peu permanent qui empoisonne les relations, un mal-être envahissant, une passivité qui empêche la réalisation des projets. 


Comment faire alors pour renouer avec notre Vrai Self, notre Soi intime, notre identité profonde, seule source véritable de stabilité et de sécurité ? 

La voix de notre Soi, nous dit Carl Gustav Jung, est une petite voix, qui nous parle sans cesse, mais de façon très ténue. Elle chuchote à notre oreille, constamment, mais il faut faire un effort pour l’entendre, noyée qu’elle est dans le concert de hurlements et de revendications qui fait rage sans cesse à l’intérieur de nous.
Il est donc nécessaire d’aller à sa rencontre, de chercher à l’entendre. 

Et dans un premier temps d’éviter de s’identifier pleinement aux masques, aux étiquettes, aux désignations, pour lui laisser un peu de place.
 Prendre conscience que chacun-e de nous n’est pas que son métier, son rôle social, son apparence physique, etc… Ca fait partie de nous, mais nous ne sommes pas que ça. Et si l’une de ces étiquettes se décolle, ce sera peut-être difficile, ce sera sans doute une épreuve, mais ça ne diminuera pas notre valeur personnelle pour autant. 

Il peut également être utile de s’autoriser à oser de nouvelles expériences, à se découvrir des capacités qui étaient restées cachées, inemployées jusque là, et à les développer. « Je croyais que j’étais d’une façon, et je me rends compte que je peux être tout l’inverse, ou autrement ». Si on l’accepte, c’est extrêmement enrichissant et peut contribuer à réduire l’écart entre Vrai Self et Faux Self, et par conséquent le mal-être lié à cet écart. 

Et puis se mettre activement à l’écoute de son identité profonde

Par l’attention portée aux rêves, par exemple. 
Et également à nos désirs profonds. A nos besoins véritables, qui sont rarement matériels, mais plutôt émotionnels : besoin de silence, de paix, de balade en forêt ou au bord de la mer ; ou au contraire besoin de relation authentique, de partage, avec des personnes « sur la même longueur d’onde » ; peut-être encore de pause, de réflexion, d’introspection, de recherche et/ou de réalisation personnelle, de créativité.
On peut également revenir à nos aspirations d’enfant, ce qu’on voulait devenir « quand on serait grand », le genre de vie qu’on imaginait. 
Et considérer que les « accidents » de la vie sont autant de signaux d’alerte, de messages nous invitant à modifier quelque chose dans notre quotidien.  



Cette nouvelle démarche n’est pas toujours facile à entreprendre, parce que ces étiquettes, ces masques, cette identité « de surface », nous avons beaucoup lutté pour les acquérir, et en général nous avons plutôt tendance à nous y cramponner. Et pourtant on découvre une sorte de liberté à les remettre en question, à jouer avec comme si c’étaient de véritables rôles, et à se mettre en quête de qui nous sommes vraiment, de notre vérité essentielle, indépendante de toutes les contingences extérieures. 




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